Opinions, Humeurs et Géopolitique

Le blog de Francis Laloupo

Doute national

Ca y est : en France, le débat sur l’identité nationale, lancé le 2 novembre 2009 par le gouvernement est officiellement clos. C’est le Premier ministre François Fillon qui s’est chargé de l’annoncer la semaine dernière, avec, posté à ses côtés, Eric Besson, ministre de l’Immigration et de l’Identité nationale, qui a fait de ce débat une cause personnelle, avec l’aval du président Nicolas Sarkozy. On s’est demandé – et nous l’avons fait ici même -quelle mouche avait donc piqué le pouvoir qui n’avait rien trouvé de mieux pour occuper les Français, que cette question : « Qu’est-ce qu’être Français » ?

 A croire que les citoyens de ce pays étaient à ce point en proie à un doute existentiel qu’il était devenu urgent de les soumettre à une thérapie collective afin qu’ils retrouvent les morceaux épars de leur réalité enfuie. L’écrivain et Prix Nobel Wole Soninka, dans son analyse critique de la négritude, disait : « Un tigre n’a nul besoin de proclamer pas sa tigritude ».
Le site internet « Grand débat national sur l’identité nationale » a été investi par les pires délires xénophobes et racistes dont le gouvernement est devenu, à son corps défendant, le récipiendaire embarrassé. Avant la clôture de ces douteuses réjouissances nationales, le ministre Eric Besson reconnaîtra qu’il s’y est mal pris (sic), et que s’il fallait recommencer, il userait de garde-fous afin de ne pas transformer ce débat « si nécessaire » en discussions de comptoir… Un bien étrange acte de contrition !
Bien entendu, l’opération furieusement électoraliste, avait pour objectif de ramener dans l’escarcelle du pouvoir les suffrages des électeurs d’extrême-droite, abonnés au comptoir de la haine xénophobe. Pourquoi alors s’étonner de n’avoir collecté que les pires dérives anti-immigrés ? D’autant que le pouvoir lui-même n’a cessé, pour alimenter ce débat, de disserter sur la place de l’islam en France, le port de la burqa, quand il ne reprenait pas à son compte un référendum sur les minarets organisé… en Suisse !
Le débat sur l’identité nationale française a pris les allures d’un détestable salmigondis, pourrissant le climat dans l’Hexagone, tout en suscitant l’effarement des citoyens les plus sereins. La question « qu’est-ce donc être français ? », c’est insidieusement transmuée en « faites la preuve que vous êtes un bon français ». Mauvaise opération politique, fiasco et néant intellectuel garantis. Bien loin de douter de leur « francitude », les Français en sont, au terme de ce débat, à douter un peu plus des pratiques et desseins de ceux qui président, à l’heure actuelle, à la destinée de leur pays.

(15 février 2010)

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