Opinions, Humeurs et Géopolitique

Le blog de Francis Laloupo

Larmes fécondes

Il est des moments de l’Histoire où des millions d’êtres ayant cette planète en partage, fécondent la Terre, en chœur, de leurs larmes. Cela arrive, de temps en temps. Expression collective d’un bonheur soudain et absolu. Cette émotion a le goût du commencement des temps. Cette indicible plénitude qui fige le temps, renvoie à jamais dans les limbes le souvenir des jours anciens où l’on espérait, toujours et encore, la fin de l’interminable tunnel d’injustices, de violences, de colères et de révoltes accumulées. Le 11 février 1990, une lumière a jailli au bout de ce tunnel.

 Et tous ceux qui ont attendu, combattu, marché, chanté, hurlé et espéré, ont vu l’épais nuage qui malmenait les consciences à travers le monde, battre en retraite enfin, vers des dimensions inconnues. Et nous l’avons vu.
Nelson Mandela, main dans la main avec son épouse Winnie – image maintes fois chantée et espérée par Hugh Masekela (Bring Him Back Home) – franchir les grilles de la prison de Robben Island, vers la liberté.
Nous étions des milliards à travers le monde à scruter chacun de ses gestes, le moindre sourire, le pas hésitant, et cette force intacte qui l’habitait. Ce jour-là, le soleil n’avait pas les mêmes couleurs. Une lumière singulière inondait le monde. Ce jour-là, tous ceux qui, trois décennies durant, ont entretenu en leur âme l’espoir de cet instant, porté dans leur chair la colère dirigée contre l’abominable apartheid – crime absolu parmi d’autres – auront ressenti, vivement, comme une deuxième naissance.

Nous sommes nés, une deuxième fois, le 11 février 1990, avec Nelson Mandela. Avec celui qui fut, 27 ans durant, le symbole de toutes les injustices dont l’humain peut se révéler aussi l’architecte. Le « plus vieux prisonnier politique au monde » deviendra l’incarnation de la tolérance, figure d’un amendement planétaire, icône universelle de l’excellence portée vers la transcendance… Le 11 février 1990, comme la fin d’une guerre, l’apaisement des consciences qui ont conjugué leurs voix et leurs actions à travers la planète pour dire non à l’injustice et l’horreur.
Il faut dire et rappeler aux jeunes générations les larmes d’espoirs dont les temps anciens furent chargés. N’oublions jamais. Il faut ralentir le cours impétueux de l’actualité pour rappeler les océans de larmes et la puissance des cris qui rendent possibles les temps nouveaux.

(3 février 2010)

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