Opinions, Humeurs et Géopolitique

Le blog de Francis Laloupo

Archives de Tag: Françafrique

Sarkozy, l’Ivoirien…

Il y a décidément de quoi en désespérer…. Nicolas Sarkozy n’est pas un subtil. Monsieur-trop. Fouteur de malaise patenté… Ici même, nous avions relevé les multiples énormités que le président français a coutume de commettre lors de ses déplacements à l’étranger, et singulièrement en Afrique… On se souvient des grossières entorses aux règles diplomatiques – ou de simple courtoisie – au Gabon, au Mali, en République démocratique du Congo, ou encore au Rwanda, ailleurs encore en Haïti… Cette fois, l’enjeu était particulièrement sensible. Être le premier président français – et le seul chef d’État « occidental » – à se rendre en Côte d’Ivoire après une crise qui a non seulement opposé les Ivoiriens entre eux, mais qui fut aussi marquée par des périodes d’extrême tension entre ce pays et l’ex-puissance coloniale. Encore aujourd’hui, le climat porte la charge de l’instrumentalisation par le régime Gbagbo des rancœurs à l’encontre d’une France accusée de réflexes impérialistes… Ces accusations, méticuleusement orchestrées par l’ancien pouvoir ivoirien, auront alimenté la fièvre des « patriotes », et, au passage, alourdi la macabre comptabilité des victimes de la crise ivoirienne… C’était hier… Pas plus tard qu’hier…

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Zaïre, Rwanda, Bénin, Tunisie, etc.

Ces rendez-vous manqués de la diplomatie française en Afrique

Fin des années 80, un tournant, certainement en Afrique subsaharienne. Troisième époque postcoloniale, après la proclamation de l’indépendance, suivie quelques petites années plus tard de l’implication de cette partie du monde dans la Guerre froide. Dans cette troisième époque de l’histoire postcoloniale, nous avons pu observer à quel point la France, ancienne puissance coloniale, a raté, à répétition, le train de l’Histoire dans ses « zones d’influence ». Tout au long de ces vingt dernières années, elle aura fait l’affligeante démonstration d’une incapacité – impréparation ?  – à accepter les mutations en cours dans ces pays auxquels elle est restée liée. Un refus obstiné d’accompagner le cours de cette histoire sans la réduire à sa lecture propre des événements, sans la ramener à son seul champ de vision. A force, cette France officielle s’est figée au bord du chemin, regardant passer le train de l’Histoire, parfois comme un acteur occasionnel et malhabile, toujours emmurée dans son désir de «stabilité » – d’immobilisme – quitte à avancer les yeux rivés sur le rétroviseur de sa propre histoire, ou de l’idée qu’elle s’en fait…

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Mariage franco-tchadien

Le rapport du ministère français de la Défense sur les exportations d’armements en 2008, rendu public il y a quelques jours, indique que le Tchad est l’un des meilleurs clients de l’Hexagone. Mieux, en 2008, les ventes d’équipement militaire français au Tchad ont progressé de 50%. Montant estimé de ces recettes : 13 millions d’euros. Pas mal, pour un pays délabré, où la quasi-totalité de la population est confrontée depuis près de deux décennies à toutes les déclinaisons imaginables de la misère et du dénuement.

Le cynisme le dispute à l’extravagance lorsque l’on sait que cette montée de la courbe des ventes d’armes françaises au régime de N’djamena coïncide avec l’appui apporté par Paris à l’armée gouvernementale tchadienne lors des affrontements entre cette dernière et les troupes rebelles en février 2008. A l’époque, ce soutien de Paris à un régime classé parmi les plus infréquentables de la planète, avait ému ceux qui s’échinaient encore à rechercher une cohérence entre la « rupture » prônée par le nouveau locataire de l’Elysée et la permanence ainsi démontrée d’une politique française en Afrique aux allures crépusculaires. La réponse est définitivement apportée par ces chiffres qui révèlent à souhait que pendant la « rupture », les bonnes affaires continuent en Afrique, ce dernier Far-West des temps modernes.
De plus, il faut noter qu’en acceptant de livrer, sans compter, des armes de diverses catégories à ce pays, Paris se détourne sans le moindre scrupule du « code conduite » adopté en décembre dernier par les 27 pays de l’Union européenne, qui se sont engagés à « ne plus vendre d’armes dont l’usage pourrait participer à de graves violations des droits humains et du droit international humanitaire, ou porter atteinte au développement économique ». Et point n’est besoin de diligenter des enquêtes sophistiquées pour reconnaître que le pouvoir du président Idriss Déby Itno est le pire ennemi de son propre peuple.
Mais il ne faudrait pas pour autant espérer que, dans ce contexte, les instances européennes émettent une condamnation à l’encontre de la France. La diplomatie de l’ombre continue d’admettre que ce territoire tchadien relève d’une diplomatie « privative » de Paris. Une manière de dérogation en somme, qui autorise les dirigeants français à maintenir leur soutien à Idriss Déby Itno qui assure à qui veut l’entendre que la France sera toujours à ses côtés. Au mépris de la volonté des citoyens tchadiens. Vous avez dit « rupture » ? Quelle rupture ?

 (15 octobre 2009)

Le boulet Bourgi

Le nom de Robert Bourgi restera associé à toutes les œuvres inavouables, constitutives du deal post-colonial franco-africain, unique au monde. Un contrat qui a tissé la trame du formidable échec de l’Afrique, en réduisant une diplomatie aux manœuvres et combines d’une société secrète où les initiés africains et français se sont offert depuis un demi-siècle un scandaleux festin privé, au mépris des peuples…

C’est ce crime fondateur de la Françafrique qui explique le courroux des Gabonais qui voient la « main invisible » de Paris dans l’élection d’Ali Bongo Ondimba, fils de son père défunt. C’est ce crime que justifie « de bonne foi » l’avocat Robert Bourgi, cet homme de l’ombre qui découvre les délices de la lumière et se répand dans la presse, pour avouer l’inavouable. Quand Paris affirme que « La France n’avait pas de candidat au Gabon », Bourgi use de l’astuce pour déclacer : « Mon candidat est Ali Bongo, et comme je suis très écouté de Nicolas Sarkozy… ». L’Elysée le désavoue, et va même jusqu’à le renier ? Il n’en a cure. Il raconte par le menu son intervention auprès de Sarkozy, à la demande de « papa » feu Bongo pour obtenir du président français de faire virer Jean-Marie Bockel de son poste de secrétaire d’Etat à la Coopération. A l’Elysée, on maudit alors ce jour – le 27 septembre 2007 -, où Sarkozy a remis l’insigne de Chevalier de la Légion d’honneur à cet homme, pour ses multiples services rendus. L’Elysée entre désir de « rupture » et troubles fidélités. Diplomatie schizophrène…
<br />L’homme de l’ombre a décidé d’aimer la lumière. De s’extraire du sous-sol des basses besognes. Ils l’ont aimé, ils vont le détester. Ils l’ont rendu puissant. Gagné par l’ivresse d’un pouvoir sordide, le conseiller occulte pour les affaires franco-africaines devient une balance. « Est-il devenu fou ?», se demandent ses commanditaires. Emissaire des diplomaties de l’ombre du village françafricain, conseiller sulfureux et grassement rémunéré, négociateur de valises « généreuses » préparées dans les palais présidentiels africains et destinées aux « amis français »… L’avocat Robert Bourgi est tout cela à la fois. Un métier rare et jamais consigné dans les registres syndicaux. La « folie » de Bourgi est un symptôme avancé du crépuscule d’un système. Convulsions désespérées d’un homme qui parle pour se convaincre que le festin continue. Alors même que les tams-tams françafricains agonisent. La fin des fêtes est toujours triste…

(9 septembre 2009)