La guerre en Côte d’Ivoire. La guerre, exactement… Tragiquement prévisible et prévue. Ivoirité sous Konan Bédié, premier coup d’État en 1999, élection « calamiteuse (dixit Laurent Gbagbo)» en 2000, promotion des « nationalités douteuses » et émergence des escadrons de la mort sous le régime de Gbagbo, irruption de la rébellion dans l’espace politique en 2002, suivi d’un long purgatoire… Les élections sans cesse reportées n’ont pas ouvert les voies d’un paradis nouveau. Au bout de ce long chemin d’épreuves, la guerre. L’ultime accomplissement de la violence qui n’a cessé de déployer son empire en Côte d’Ivoire depuis plus d’une décennie.
La guerre au bout du chemin… Il fallait donc en arriver là pour admettre que les termes dialogue, médiation, solution diplomatique, et leurs corollaires relevaient, depuis longtemps déjà de l’anachronique… Cela fait un moment que ces mots ont déserté le champ de la politique en Côte d’Ivoire. Il n’y avait plus place pour la pensée politique. La haine a remplacé le dialogue, et la démonstration politique a cédé face aux offensives de l’incantation. Le messianisme a remplacé la raison, et Laurent Gbagbo, entouré des siens, a décidé d’écrire sa légende, au prix de vies humaines sacrifiées sur l’autel des ambitions perverties… C’est le dernier acte de cette légende qui s’écrit sous nos yeux, depuis jeudi dernier, faisant fi des larmes des Ivoiriens…
La « résistance » du dernier carré des troupes de Gbagbo n’a rien d’étonnant. Dix ans au pouvoir, dont la moitié sans élection. Durant les cinq dernières années, le locataire du palais présidentiel s’est employé à accumuler un arsenal impressionnant, tout en constituant une garde prétorienne, avec la bienveillance intéressée de quelques « amis », le régime angolais en tête. A l’issue de la (contestable) réunion de Marcoussis, fin 2002, Laurent Gbagbo, avant de dévoiler ses arrière-pensées, avait déclaré dans l’enceinte de l’ambassade de Côte d’Ivoire à Paris : « J’ai perdu la guerre, j’accepte les accords (de Marcoussis) ». Depuis, l’homme qui se définit lui-même comme un « guerrier », n’a cessé de rêver d’une vengeance contre ceux qui ont eu l’outrecuidance de s’élever contre « son » pouvoir. Voici donc venu le temps de la revanche… Jusqu’au bout de la nuit.
La plupart des observateurs s’attendaient à une prise éclair d’Abidjan par les Forces Républicaines. Mais la stratégie militaire se trouve soumise à un mot d’ordre : préserver la vie de Laurent Gbagbo. Un impératif signifié et répété par Alassane Ouattara. Une explication aux multiples reports de « l’assaut final » contre le palais ou la résidence de Gbagbo.
Peut-on déjà penser à l’après-guerre ? Commençons donc, modestement… La crise que connaît la Côte d’Ivoire, depuis 2002, aura révélé un personnage, central, ascendant : Guillaume Soro. Révélation d’une exceptionnelle capacité politique, cette figure politique jusque-là peu connue de la rébellion, qui a déboulé en 2002 dans l’histoire de la Côte d’Ivoire, sera aussi l’homme – controversé au sein de son propre camp – des accords de Pretoria en 2005, puis de Ouagadougou en 2007. Premier ministre de cohabitation de son « meilleur ennemi » Laurent Gbagbo, il sera l’artisan inconfortable du processus électoral qui s’est conclu par la victoire d’Alassane Ouattara en novembre dernier. En prenant acte de cette victoire, et en se mettant à la disposition de Ouattara, c’est lui, bien davantage encore que la Commission électorale, qui aura conforté la « légitimité » du vainqueur de l’élection. En tout cas, une fois devenu le Premier ministre du président élu, c’est lui qui confectionnera, notamment avec ses Forces Nouvelles (rebaptisées Forces Républicaines), un territoire – symboliquement représenté par l’hôtel du Golfe à Abidjan – de l’exercice du pouvoir de Ouattara. Depuis quelques jours, c’est le même Guillaume Soro, chargé de la Défense par le président élu, qui est l’ordonnateur de l’acte final, ultime, de cette crise : la solution militaire… Figure de la rébellion, gestionnaire des accords de paix, arbitre des élections et acteur majeur de l’ultime affrontement… Personnage central, décidément, de cette crise ivoirienne… A suivre, nécessairement.
Quel sera le bilan de la guerre ? Lourd, forcément lourd. Par conséquent, si l’issue de l’affrontement militaire en cours lui devenait favorable, Alassane Ouattara ne pourrait plus, simplement, se contenter d’une légitimité électorale. Une élection a eu lieu, c’est vrai. Mais, entre-temps, les armes aussi auront parlé. Aussi, la tâche sera extrêmement rude et compliquée pour cet homme, une fois aux commandes de la Côte d’Ivoire. En plus d’engager un âpre processus de réconciliation nationale, il lui faudra, surtout et d’abord, conquérir une deuxième légitimité. Autrement dit, confirmer celle que les urnes lui ont accordée en novembre dernier. Et si, après les armes, Ouattara acceptait de s’en remettre de nouveau aux urnes ? Par exemple, en soumettant la confirmation de sa légitimité à un référendum ? A notre avis, un tel geste politique ne serait pas inutile.
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Un simple coup de gueule sans être hors sujet.
j’ai très souvent suivi vos interventions à propos de la cote d’ivoire ,que ce soit à la radio ou sur votre blog et malgré tout le respect et l’admiration que j’avais pour vous et votre oeuvre ,combien ai-je été déçu de vous voir si partial et si acharné concernant le sujet;parfois je me pose la question de savoir (au vu de la grille des programmes et de la présence de plus en plus prépondérante du groupe »africa » média ) si cette radio jadis la notre n’est pas devenue aujourd’hui un outil de propagande.
Et si c’est le cas , c’est vraiment dommage (vu l’espoir et la fierté que nous avons pour vous l’élite africaine ) de mette votre talent au service des forces concourante à appauvrir et avilir votre continent d’origine pour une soif d’estime, de »prestige »ou pour des raison alimentaires.
Merci de votre courrier qui, malheureusement, s’égare, à sa conclusion, en de vaines hypothèses. Notre continent, que vous évoquez, se porterait certainement mieux, si l’on apprenait à respecter la vérité des uns et des autres. C’est de la confrontation –sereine – des arguments et des réflexions que surgit l’ombre prometteuse d’une vérité. Veillez à ne pas opposer la vôtre à celle des autres, à la manière d’un pugilat. Et, surtout à ne pas vous perdre en ces projections triviales, comme celles qui concluent votre courrier. Mon expérience et mon parcours attestent largement de ce qui me sépare de ces viles suppositions et considérations. Sachons, en tous temps et lieux, conserver la beauté des choses.
Bien cordialement.
Francis Laloupo.
Veuillez tout d’abord excuser ma »divagation » qui est beaucoup plus un questionnement vis à vis de toute cette injustice manifeste qui anime l’actualité.
Est ce honnête de parler de confrontation et de débat quand on attribue des heures et des heures d’antenne à une opinion sans vraiment tenir compte de celle en face en l’interrompant et l’étouffant de manière intempestive (quand il y’en a une), ou par son absence totale? est ce un débat que de sélectionner les auditeurs intervenant à l’antenne? étouffant conséquemment la version qui ne vous satisfait pas?
Pourtant équitable vis à vis des sujet du Maghreb ou du moyen orient vous avez complètement pris partie pour un camp s agissant de la cote d’ivoire
Vous pourrez tromper une certaine catégorie de personnes à travers certaines tournures rhétoriques,mais beaucoup d’entre nous ne sommes pas dupes , vous êtes bel et bien instrumentalisés concernant le débat sur la cote d’ivoire.
Mon coup de gueule tout simplement par ce que vous êtes une personne pour qui (au risque de me répéter) j’ai souvent eu beaucoup d’admiration et de fierté, je préfère le Francis Laloupo impartial.
très cordialement .
Thomas Miteteuh
Bonjour, Francis,
Ton interlocuteur annonce son « coup de gueule » que tu qualifies de « viles suppositions » : dur …
Il te pense « partial » et ce n’est pas faux, puisque tu as une opinion devenue une conviction ?
Je ne sais pas ce qu’est « africa media » ni si tu y participes : elle aurait exprimé un point de vue qui aurait changé ? Pour ce qui te concerne, tu aurais obéi à des considérations de « soif d’estime, de prestige ou pour des raisons alimentaires » : ça, c’est simplement diffamatoire, non, Thomas ?
On se calme !
Bonjour, Thomas,
Maintenant que tu as poussé ton coup de gueule, rien ne s’oppose à ce que tu affirmes que tes mots passionnés ont dépassé ta pensée. Francis aimerait que son blog soit un lieu « de partage et de réflexion » mais tu es dans l’insulte simple et c’est navrant, quelle que soit ta souffrance et tes arguments.
Francis, il est manifeste que ton argumentaire n’est pas compris : peut être devrait-il s’exposer plus à plat, mais combien il deviendrait ennuyeux et pontifiant …
Mon point de vue :
Par inclination, je préfère « l’homme honnête » plutôt que « l’honnête homme »
N’entrez pas dans la polémique « Indignez-vous » contre « J’y crois pas » (Orimont Bolacre)
Allez, réconciliez-vous, bande de blacks aux sangs chauds !